Vous l’avez probablement vu passer dans les médias : depuis le 25 août, les grandes plateformes sociales doivent se mettre en conformité avec une nouvelle législation européenne, le Digital Services Act, ou DSA. Mais concrètement, qu’est-ce que ce DSA pour les réseaux sociaux va changer pour les utilisateurs – et donc pour vous, marketeur ?

Décryptons ensemble ici ces nouvelles obligations et la manière dont les réseaux sociaux ont réagi à date.

Quelles sont les nouvelles obligations du DSA pour les réseaux sociaux ?

Pour comprendre quelles implications le Digital Services Act aura sur vos pratiques Social Media, il vous faut d’abord comprendre ce qui change pour les plateformes. Voici ce que ce nouveau cadre juridique leur impose.

Une gestion plus assidue du contenu non approprié sur les plateformes

Tout d’abord, la DSA demande aux réseaux sociaux d’être plus responsables de la suppression du contenu inapproprié sur leur site. La lutte contre le racisme, l’antisémitisme, les contenus haineux ou dangereux, s’intensifie donc grâce à cette législation.

La DSA pour les réseaux sociaux inclut notamment : 

  • La mise en place d’une modération humaine des contenus postés, dans chaque pays, pour débusquer les propos haineux, racistes, insultes et autres faits de harcèlement.
  • L’ajout de systèmes de signalement simples et efficaces, par les utilisateurs mais aussi par les signaleurs de confiance et les États eux-mêmes.
  • Le traitement rapide par la plateforme de ces signalements.
  • La mise en place de protocoles de crise en cas de guerre sur demande de l’Europe, qui peut imposer des mesures d’urgence temporaires.

Une protection accrue des données traitées 

Autre obligation édictée par le DSA pour les réseaux sociaux considérés comme des “très grandes plateformes” (soit pour celles qui accueillent au moins 45 millions d’utilisateurs mensuels actifs dans l’UE et 10 000 utilisateurs professionnels par an) : une surveillance accrue en ce qui concerne les données traitées.

Ces plateformes de taille massive doivent désormais : 

  • Nommer un responsable conformité chargé de veiller au respect du Digital Services Act.
  • Accueillir des audits indépendants une fois par an, visant à vérifier les risques systémiques en termes de données, et menant à des rapports envoyés à la commission européenne.
  • Permettre plus de lisibilité sur leurs conditions d’utilisation : exit les cinquante pages de CGU !
  • Ouvrir l’accès à leurs données publiques pour les chercheurs universitaires, notamment afin d’étudier l’impact des réseaux sociaux sur la santé mentale, la propagande ou le cyberharcèlement.

Vers des feeds et algorithmes moins personnalisés

L’un des objectifs du DSA pour les réseaux sociaux qui va changer vos pratiques webmarketing est le suivant : pousser à la mise en place de feeds qui ne sont pas influencés par un algorithme. Cette mesure est dispensée afin de lutter contre la désinformation et l’addiction aux écrans, mais aussi pour préserver la santé mentale des utilisateurs.

Pour cela, le Digital Services Act mentionne que les plateformes doivent : 

  • Modifier leurs algorithmes pour qu’ils ne proposent pas uniquement de contenu ultra-personnalisé et ciblé. Elles doivent ainsi proposer aux utilisateurs des algorithmes alternatifs, avec un simple affichage chronologique des posts.
  • Ouvrir leurs algorithmes aux autorités pour que celles-ci puissent les analyser.

Un contrôle renforcé de la publicité sur les réseaux sociaux

Dernier volet de la DSA pour les réseaux sociaux : le renforcement du contrôle de leurs fonctionnalités publicitaires.

Ici, la législation est simple : il s’agit d’interdire le ciblage publicitaire : 

  • Pour les enfants
  • À partir de données discriminantes et sensibles (comme l’orientation sexuelle ou la religion)

Que de changements pour des plateformes qui, jusqu’alors, pouvaient se cacher derrière leur rôle de “simple intermédiaire” !

DSA pour les réseaux sociaux, DSA pour les réseaux sociaux : que change cette nouvelle législation européenne ?

Quels changements les plateformes de réseaux sociaux opèrent-elles suite au DSA ?

Face à la DSA, les réseaux sociaux majeurs ont, pour la plupart, rapidement réagi. Voici quels changements ont été menés à date sur TikTok, Facebook, Instagram, LinkedIn et Twitter (X).

Sur TikTok

Afin de s’assurer d’être en conformité avec le DSA, TikTok a rapidement annoncé plusieurs mesures (déjà prises ou à venir).

Tout d’abord, le changement majeur qui opère sur TikTok concerne son algorithme de recommandations de contenu. La plateforme a annoncé qu’il sera bientôt possible pour les utilisateurs de désactiver la personnalisation de leur fil

À la désactivation de cette personnalisation : 

  • Les feeds “Pour toi” et TikTok Live vont cesser d’afficher du contenu basé sur les centres d’intérêt de l’utilisateur, pour laisser place à des vidéos populaires sur l’app.
  • Les fils “Abonnements” et “Amis” seront organisés dans l’ordre chronologique de publication des posts, et non plus en fonction d’une personnalisation vis-à-vis des données de l’utilisateur.

Les changements liés à la DSA pour les réseaux sociaux concernent également TikTok Ads. Désormais, les TikTokeurs européens entre 13 et 17 ans ne peuvent plus voir de publicités personnalisées basées sur leurs activités sur la plateforme ou en dehors.

Enfin, TikTok a également ajouté à ses options de signalement une nouvelle fonctionnalité, plus simple et détaillée, qui permet de signaler des contenus illégaux et inappropriés – y compris les contenus publicitaires.

signaler des contenus illégaux et inappropriés sur TikTok

La plateforme a également annoncé déployer une nouvelle équipe de modérateurs et juristes, totalement dédiés à l’analyse de ces signalements.

Dans l’univers Meta (Facebook, Instagram)

Meta fait partie des réseaux sociaux qui ont réagi le plus vite au Digital Services Act pour prouver sa bonne volonté. Rapidement, Meta a annoncé avoir déployé plus de 1000 personnes sur le travail de mise en conformité avec la législation.

Les changements au système publicitaire de Facebook Ads et Instagram Ads ont été déployés très rapidement. Tout d’abord, ces régies ne permettent plus aux annonceurs de cibler des utilisateurs entre 13 et 17 ans en se basant sur leur activité. Ces utilisateurs ne peuvent désormais être ciblés que par tranche d’âge ou par géolocalisation.

Par ailleurs, Meta a renforcé sa Bibliothèque publicitaire (ou Ad Library)  pour archiver et afficher toutes les publicités qui ciblent des utilisateurs européens pendant un an. L’idée est bien de donner facilement accès à ces données aux autorités et aux chercheurs.

capacités de recherche dans la Bibliothèque Publicitaire de Meta

Message Meta qui indique la prise en compte du DSA

Dernier changement d’ores et déjà mis en place côté publicitaire : le remaniement de la fonctionnalité “Pourquoi vous voyez cette publicité”, sur Facebook comme sur Instagram. Celle-ci apporte désormais plus de transparence aux utilisateurs sur le ciblage mis en place.

Pourquoi vous voyez cette publicité sur Facebook et Instagram

Du côté des algorithmes de Facebook et d’Instagram, Meta a annoncé travailler sur de nouveaux systèmes qui permettraient aux utilisateurs de reprendre la main sur leurs feeds. L’idée : leur donner la possibilité de sélectionner un feed qui n’est pas nourri par l’algorithme, et qui présente des posts de manière chronologique, ainsi que ceux uniquement publiés par les utilisateurs qu’ils suivent. Ce changement sera appliqué tant sur Facebook que sur Instagram, et sur tous les formats, incluant les Reels et les stories.

Enfin, pour être 100% en conformité avec le DSA pour les réseaux sociaux, Meta a également simplifié ses outils de signalement des contenus illégaux et inappropriés sur ses deux plateformes majeures.

Sur LinkedIn

Chez LinkedIn, c’est Patrick Corrigan, VP of Legal & Digital Safety, qui s’est exprimé sur le sujet dans un article à même la plateforme.

Il annonce tout d’abord que LinkedIn va faire preuve de plus de transparence

  • Sur ses décisions, en indiquant à chaque modération d’un signalement si cette modération a été faite par un humain ou par un système automatisé.
  • Sur ses publicités, en boostant la fonctionnalité “Pourquoi est-ce que je vois cette publicité ?”, afin d’inclure des informations supplémentaires sur le type de publicité que les membres voient.

Pourquoi est-ce que je vois cette publicité sur LinkedIn

Qui plus est, LinkedIn annonce la mise en place d’un feed plus flexible pour les utilisateurs. Ceux-ci peuvent désormais sélectionner un feed de publications non-personnalisé, où les posts sont triés par chronologie – mais qui inclut tout de même du contenu publié par les personnes suivies ou leur réseau.

Préférences du fil d'actualité sur LinkedIn

Sur X (Twitter)

Côté Twitter, à date, on attend toujours une réponse concrète des équipes. La seule information : après l’avoir rencontré en 2022 pour parler du sujet, Elon Musk a répondu à Thierry Breton, père du DSA, qu’X “travaillait fort” sur le sujet. Affaire à suivre…

Au fait, qu’est-ce que le Digital Services Act ?

Le DSA est un texte de loi européen publié le 27 octobre 2022, après deux ans de débats sur la législation des services numériques. Il part d’un principe simple que l’Union Européenne veut appliquer : “ce qui est illégal hors ligne doit aussi l’être en ligne”. On l’a publié en même temps que le Digital Market Act (ou DMA) qui vise à renforcer la concurrence et à mieux encadrer la publicité ciblée à partir de 2024.

L’objectif global du DSA : encadrer les plateformes, pour mieux protéger les consommateurs européens, notamment des contenus illicites. L’idée est donc de pousser à la responsabilisation des plateformes face aux dérives de leurs utilisateurs. Le DSA vient ainsi uniformiser au niveau européen le contrôle et la surveillance des plateformes.

Le Digital Services Act (DSA) entre en application le 25 août 2023 pour les 19 “grandes plateformes” que sont : 

  • AliExpress (Groupe Alibaba)
  • Amazon
  • L’App Store d’Apple
  • Bing
  • Booking
  • Facebook
  • Google, Google Play Store, Google Maps et Google Shopping
  • Instagram
  • LinkedIn
  • Pinterest
  • Snapchat
  • TikTok
  • Wikipédia
  • X (Twitter)
  • YouTube
  • Zalando

Les autres plateformes devront se mettre en conformité pour le 17 février 2024.

Les sanctions encourues par les plateformes en non-conformité sont grandes : jusqu’à 6% du chiffre d’affaires annuel de la plateforme. Et en cas de manquement répété, une interdiction totale de l’application en Europe.

En bref : les implications Digital Services Act pour les réseaux sociaux

Vous l’aurez compris : le DSA pour les réseaux sociaux risque de changer la manière dont les utilisateurs consomment du contenu sur la plateforme, et l’expérience qu’ils y vivent.

Raison de plus pour vous, marketeur, d’œuvrer à l’animation de communautés engagées autour de votre marque, ou de travailler avec celles d’influenceurs !

 

À propos de l’auteure

Eléonor Biriotti

Eléonor Biriotti est plume & stratège Inbound freelance. Vous pouvez lire ses textes notamment sur les blogs d’Agorapulse et de PlayPlay !

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